Tant bien que mal – Arnaud Dudek

Vingt-trois après les faits, un jeune homme reconnaît soudainement la voix de celui qui l’a violé… Un électrochoc et une parole qui se libère, enfin. Le livre le plus déstabilisant que j’ai lu en 2018.

Éditeur : Alma Éditeur

Nombre de pages : 96

Parution : Avril 2018

Prix : 14 €

Version ebook disponible

Il aurait pu être le plus court que j’ai lu cette année (96 pages) mais il n’en a pas moins été le plus déstabilisant. Et c’est cela que je retiendrai de cette première lecture d’Arnaud Dudek. La raison en est simple : ce qu’il évoque est ce qu’en tant que parent, nous pouvons redouter de pire, le kidnapping et le viol de son enfant.

Est-il possible de passer totalement à côté d’un tel drame ? On a beau se dire que c’est inconcevable, que l’on serait forcément alerté par des signes… Et pourtant. En quelques mots choisis, l’auteur évoque mon pire cauchemar, celui où un enfant marchant seul dans la rue est accosté par un conducteur et accepte d’entrer dans le véhicule.

« Je suis en partie mort ce soir là ».

 

Joey Saladino fait une expérience sociale dans la vidéo « Child abduction ». Capture d’écran Youtube

Tels sont les mots de l’enfant devenu grand. Un enfant qui, pétri de culpabilité d’avoir accepté de suivre cet inconnu ayant vraisemblablement récidivé et voulant à tout prix ne pas peiner et inquiéter ses parents, cache l’horreur et se construit avec elle. Trente minutes d’enfer qu’il a ensevelies au plus profond de lui, s’en accommodant, « tant bien que mal ».

J’ai lu ce livre il y a plusieurs mois sans parvenir à écrire dessus, si ce n’est que j’en suis sortie la gorge serrée, sonnée. Difficile d’exprimer ses émotions lorsque la plume de l’auteur est si délicate et pertinente. Qu’ajouter de plus ? Je ne crois pas avoir lu, avant celui-ci, de livre aussi court et si intense en même temps. Une écriture serrée pour exprimer non l’agression elle-même mais le trouble, la vie après, la résilience, la (re)construction par les mots, grâce à l’amour, sans occulter les tocs, les cauchemars et les automutilations et l’incapacité à se décider.

Des phrases très poétiques pour dire l’intime, une écriture délicate et imagée qui m’a bouleversée face à cet enfant qui a grandi et qui, vingt-trois après les faits, reconnaît soudainement la voix de son agresseur… Un électrochoc et une parole qui se libère, enfin.

 

©Alexia Thomas

À propos de l’auteur

 

Arnaud Dudek, né à Nancy en 1979, publie avec Tant bien que mal son cinquième roman. Dans ses nouvelles (pour la revue littéraire Les Refusés ou pour Décapage) et dans ses romans (tous publiés chez Alma), il raconte les gens ordinaires avec humour et tendresse. Son premier roman, Rester sage (2012) a fait partie de la sélection finale du Goncourt du premier roman. Le deuxième, Les fuyants (2013), a été sélectionné pour le prix des lycéens et apprentis de Bourgogne. Le troisième, Une plage au pôle Nord (2015) est traduit en allemand. Les vérités provisoires (2017) est son quatrième roman.

Quelques pages en extrait du livre….

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