La fièvre
📺 𝗟𝗔 𝗙𝗜𝗘̀𝗩𝗥𝗘 | 𝗖𝗥𝗘́𝗘́𝗘 𝗣𝗔𝗥 𝗘𝗥𝗜𝗖 𝗕𝗘𝗡𝗭𝗘𝗞𝗥𝗜 𝗥𝗘́𝗔𝗟𝗜𝗦𝗘́𝗘 𝗣𝗔𝗥 𝗭𝗜𝗔𝗗 𝗗𝗢𝗨𝗘𝗜𝗥𝗜 | 𝟮𝟬𝟮𝟰 | 6 × 52 min | avec Nina Meurisse, Ana Girardot, Benjamin Biolay
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On connaissait notamment le single du groupe Suprême NTM, « La Fièvre » ; c’est aussi le titre d’une série saisissante écrite par Eric Benzekri. Elle s’ouvre avec une cérémonie de remise de prix dans le milieu du foot lors de laquelle l’un des joueurs favoris assène un coup de tête à son entraîneur, l’insultant de « sale toubab » – blanc – , sous les yeux des caméras. Les réseaux s’emballent : certains pointent un acte raciste anti-blanc commis par un joueur racisé et la récupération politique est immédiate. Le président du club fait alors appel à une agence spécialisée en gestion de communication de crise. Tensions identitaires exacerbées, embrasement des esprits, opinion publique manipulée… un cocktail explosif où, insidieusement, la question de la vente libre des armes à feu s’invite dans le débat public.
Au centre de ce déchaînement, deux femmes s’opposent. Elles se connaissent et ont même été un temps proches. La première, Sam Berger, travaille pour l’agence de communication sollicitée et tente par tous les moyens en sa possession de mettre en place une stratégie destinée à éviter le chaos, quitte à y laisser un peu d’elle. Dans son combat républicain, elle affronte la redoutable Marie Kinsky, une populiste opportuniste de droite, standupeuse au succès grandissant, maître dans l’art de la rhétorique. Leurs armes sont identiques dans cet affrontement où l’une semble perdre du terrain un peu plus chaque jour, tandis que l’autre jubile.
Le foot apparaît davantage comme un prétexte dans cette série qui décrypte comment une guerre civile prend forme au sein d’une société, non seulement attisée mais également organisée sur les réseaux sociaux.
« Il ne restait qu’une chose à faire : se replier sur soi-même et se taire aussi longtemps que dureraient la fièvre et le délire des autres. » écrivait Stefan Zweig dans « Le monde d’hier » cité dans la série. Heureusement, certains donnent de la voix.
Ancien conseiller politique socialiste, le scénariste Eric Benzecri invite à réfléchir à la façon dont les opinions sont construites, après s’être intéressé avec beaucoup de talent aussi sur celle dont le pouvoir s’acquiert à travers la série Baron Noir. La fin de La Fièvre laisse penser que les deux séries pourraient être amenées à se rejoindre. Le regard de l’auteur de la série, après la dissolution et les élections françaises qui ont suivi, est vraiment bluffant. Une série à voir !