DE LA SENSIBILITÉ À L’ÉCRITURE MANUSCRITE D’UN AUTEUR
En écoutant l’autre jour la radio, j’apprenais que l’appel du 18 juin 1944 du Général de Gaulle allait être exposé au public pour la première fois de l’histoire, à l’occasion d’une vente aux enchères, un discours écrit seulement quelques heures avant d’être prononcé sur les ondes de la BBC. Le commissaire-priseur en charge de la vente, interviewé sur France Inter, observait les quelques feuilles jaunies et pleines de ratures : « On le voit l’écriture est extrêmement dense (…) On sent qu’il est quand même en train de réfléchir, à revenir sur ses idées, à améliorer sans cesse le discours. (…) Je n’ose pas trop le tenir en main. Il y a beaucoup d’émotions d’avoir ce type de document. C’est un des morceaux d’Histoire, un élément fondateur. »
Et qu’en est-il du devenir des écritures d’écrivains contemporains ? Rares sont ceux qui rédigent encore à la main, privilégiant la saisie numérique. Et on les comprend ! Qui d’entre nous utilise encore de manière régulière un stylo et des carnets pour rédiger un texte ? Quelques notes ou lettres, et encore… Ces correspondances laissent plus souvent place aux mails, MP et textos divers, appelés à disparaître, ensevelis dans des flows continus. Un suivi des modifications activé n’aura jamais la même saveur que la page manuscrite d’un roman raturée, annotée, coloriée… Demeurent certaines dédicaces qui, lorsqu’elles sont personnalisées, constituent parfois des souvenirs de rencontres précieux. Pas de nostalgie ici, juste un constat.
Restent aussi des manuscrits accessibles à tous. On pense à la Bibliothèque Nationale de France, et au personnage de Vasco dans Mon maître et mon vainqueur de François-Henri Désérable qui, profitant de pouvoir accéder à la Réserve des livres rares, dévoilait à la femme séduite le manuscrit des Fleurs du mal du Baudelaire corrigé à l’encre noire par l’auteur… Plus accessibles des beaux livres édités par les Editions des Saints Pères qui proposent notamment des reproductions de livres rares et illustrés, par exemple l’un des derniers édités, « Je t’aime » par Dominique Marny, où on trouve notamment « Alcools » de la main d’Apollinaire, ou encore un extrait de « La Nuit des temps » de René Barjavel.