Connemara

 

Un film d’Alex Lutz

Avec Mélanie Thierry, Bastien Bouillon, Jacques Gamblin

d’après le roman de Nicolas Mathieu

 

 

Faut-il aller voir «Connemara», l’adaptation du roman de Nicolas Mathieu par Alex Lutz ? Un très grand OUI !

Que vous ayez lu et apprécié le roman, ou pas.

Que vous veniez de la région Grand Est, ou d’ailleurs.

Que vous soyez quarantenaire, plus jeune ou plus âgé

Que Michel Sardou vous insupporte ou que vous ne résistiez pas à chantonner ses tubes.

Foncez au ciné !

Mélanie Thierry incarne Hélène, une femme en colère, contre le temps qui lui manque, contre toute la charge mentale qui pèse sur elle, contre son travail de consultante accaparant. A la suite de son burn out, elle quitte Paris et retourne s’installer dans les Vosges avec son mari et ses filles. Elle y retrouve un travail, une jolie maison…et pourtant, rien ne va. Elle recroise alors son crush d’adolescente, Christophe, star de l’équipe de hockey locale qui ne la calculait pas du tout à l’époque. Lui, interprété par Bastien Bouillon, est là. Il n’a pas bougé. Commercial, il partage son temps entre son travail, son fils dont il a la garde en alternance, sa bande de copains, et son père déclinant et perdant peu à peu la mémoire. Débute entre eux une histoire : rien n’est simple à 40 ans. Des gestes un peu gauches, des baisers empruntés. Et un tempo qu’ils finissent par trouver. Mais pour aller où ?

Alors oui, il faut aller voir Connemara.

Pour la justesse des acteurs, impeccables, émouvants et séduisants. Bastien Bouillon excelle dans ce rôle sur le fil, aussi convainquant auprès d’Hélène avec laquelle il avance, doucement, sans emballement, qu’avec son fils, Gabriel. Une scène notamment où il lui explique à quel point la séparation et la distance peuvent avoir du bon : deux maisons, deux fois plus de cadeaux… tentant de le réconforter alors même que la situation lui pèse terriblement. Ses rapports avec son père sont également très touchants. Peu de mots échangés mais une tendresse, une attention qui fendent le cœur. Jacques Gamblin – ce père en perdition – est lui aussi d’une justesse incroyable. Quant à Mélanie Thierry, elle crève l’écran. Souvent filmée en gros plan, elle ne triche pas et nous offre une Hélène perdue et déprimée, qui tente de résister. Magnifique, elle donne à voir une femme authentique, qui malgré ses efforts, peine à retrouver un équilibre.

Un film à ne pas manquer non plus pour la réalisation subtile et sensible d’Alex Lutz qui a su parfaitement capter bon nombre d’émotions ressenties à la lecture du roman tout en proposant une œuvre originale. Il tisse ensemble les trajectoires d’Hélène et de Christophe, nous faisant entrer dans leur intimité avec délicatesse, et y mêle ce questionnement social sur la possibilité réelle de changer de milieu social, de s’y épanouir, et puis d’y revenir quand la tentative de s’en extraire s’est révélée un échec.

Nouvelle adaptation réussie d’un des romans de Nicolas Mathieu après le très beau « Leurs enfants après eux » en décembre dernier de Ludovic et Zoran Boukherma. Il faudra désormais patienter davantage pour un nouveau film, le temps de laisser l’auteur publier un prochain roman. On imagine la pression sur les futurs réalisateurs après ces deux très beaux films. A noter l’adaptation de l’un des ses autres livres au théâtre cette fois : « Royal » mis en scène par Romane Borhinger et interprétée par Anne Charrier, à la Comédie des Champs-Elysées jusqu’au 28 décembre qui semble très réussie aussi.

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