Western – Maria Pourchet

 

 

Un roman qui propose une relecture post #MeToo de Dom Juan à la mode western : brillant !

 

Éditeur : Stock

Nombre de pages : 304

Parution : Août 2024

A quoi tient le fait qu’une lecture parmi toutes se démarque et nous percute ? Au style, c’est certain et ils sont finalement peu nombreux les auteurs contemporains qui s’imposent à moi par leur personnalité, leur regard et leur manière de dire notre société. La talentueuse Maria Pourchet en fait indéniablement parti et nous offre une relecture post #MeToo de Dom Juan à la mode western avec ce roman tout à fait singulier.

Quelle époque formidable où chaque jour réserve son lot de déceptions et d’écœurement à l’égard de personnalités longtemps admirées ! Pas une semaine ne passe sans apprendre les suspicions de violences intolérables dont tel acteur, écrivain, homme public serait l’auteur… C’est à l’un d’entre eux que s’intéresse la romancière. Son héros, Alexis, est un comédien très populaire, sur le point de se produire dans une adaptation théâtrale de Dom Juan de Molière, séducteur et manipulateur hors pair. Mais alors qu’il est attendu sur le plateau, il ne se présente pas et fait savoir qu’il laisse le beau rôle à l’actrice interprétant Elvire, venant tout juste de réaliser que les femmes étaient moins bien payées que les hommes ! Un scoop… Il décide de se retirer dans le Lot où il est propriétaire d’une petite maison, occupée – il l’ignore – par Aurore, une mère célibataire un peu perdue, ayant quitté la région parisienne avec son fils pour se reconnecter à l’essentiel.

Une retraite qui dissimule en réalité une fuite : venant de rompre avec la jeune Chloé, Alexis a souhaité s’éloigner des feux brulants des projecteurs. Une fois les « présentations » faites avec Aurore, s’engage entre ces deux désabusés de la vie et de l’amour un dialogue, sorte de mise à nu ne souffrant plus aucune dissimulation et arrangements, alors que s’abat sur l’acteur une tempête médiatique sans précédent où il se retrouve accusé de violence morale et non-assistance à personne en danger.

Avec un sens de la narration incroyable, beaucoup d’humour, un rythme soutenu et des punchline en rafale, Maria Pourchet interroge notre époque, les notions de violence, d’emprise, de liberté et de langage avec une pertinence que j’avais rarement lue et une analyse des figures rhétoriques à travers un examen approfondi d’une messagerie qui marquerait sans doute beaucoup plus les esprits des ado que bon nombre de cours de français ! Ouvrage récompensé par le Prix de Flore cette année.

Quelques unes ici :

 « J’entends par western un endroit de l’existence où l’on va jouer sa vie sur une décision, avec ou sans désinvolture, parce qu’il n’y a plus d’autres sens à l’existence que l’arbitraire.​ ».
 « La seule réponse à la torture quand on n’est pas suicidaire, c’est le plaisir.​ ».
 « Il nous déçoit, Alexis, à se penser unique dans un exercice où se sont qualifiés la plupart des transfuges de classe. Baiser les détentrices du code et repartir avec les clés, grossier classique de l’éducation sentimentale.  ».
 « Le problème avec la violence psychologique, c’est qu’on peut. Le problème avec elle, c’est de lui avoir si longtemps donné d’autres noms. Comme passion, comme liberté. Le problème avec l’emprise c’est son synonyme, l’amour, et le problème avec lui ce sont ses droits. Le problème avec la douleur c’est qu’elle veut faire savoir. Et alors le problème avec le scandale ce sont ses conséquences.  ».

©️ Richard Dumas

À propos de l’auteure

 

Maria Pourchet est née en 1980 à Épinal (Vosges). Elle est romancière, sociologue, et scénariste pour le cinéma et la télévision. Elle est notamment l’autrice de Champion (2015) Toutes les femmes sauf une (Prix Révélation de la SGDL 2018), Les Impatients (2019), ou encore Feu (2021).

Quelques pages en extrait du livre….

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