Une fille du Sud – Juliette Granier
« Il est souvent discuté du pouvoir que les hommes détiennent ; mais plus rarement de celui que les femmes découvrent ». La conquête de soi au féminin dans un très joli premier roman.
Éditeur : Gallimard
Nombre de pages : 192
Parution : Juin 2024
Après avoir assisté il y a quelques jours à un concert géant intégralement traduit en langue des signes, autre expérience musicale insolite ce soir où une pianiste a enchaîné une très belle interprétation des variations Goldberg au beau milieu d’un atelier d’artiste – celui du sculpteur suisse Yves Dana –, suivie d’un entretien qu’elle m’a accordé à l’occasion de la publication de son premier roman. Un mélange des genres artistiques surprenant ! Et, Suisse oblige, une soirée organisée par un établissement financier, la Banque Piguet Galland, qui a le bon goût de soutenir des événements culturels de qualité !
L’ambiance tenait au recueillement : une lumière tamisée, un lieu grandiose situé à Lausanne, au sein d’un parc assombri par la nuit tombée et recueillant des œuvres souvent monumentales, brutes, taillées dans la pierre ; les notes de Bach résonnant dans tout cet espace à l’acoustique incroyable, et Juliette Granier. Pianiste soliste romande, autrice, compositrice, interprète, animatrice et productrice d’une émission de radio quotidienne, la jeune femme affichait un sourire radieux au moment d’évoquer son premier roman publié par Gallimard en juin dernier, « Une fille du Sud ».
« Il est souvent discuté du pouvoir que les hommes détiennent ; mais plus rarement de celui que les femmes découvrent » écrit-elle en ouverture du livre : une histoire d’émancipation féminine à travers le personnage de Catalina, petite fille de 8 ans quand débute le roman. Nous sommes en Catalogne française, merveilleusement décrite par l’autrice dont c’est la région d’origine La petite observe le monde qui l’entoure, l’étudie, et se révolte davantage au fil des années sur le sort réservé aux femmes et l’image qu’elles renvoient. Esseulée dans une famille atypique composée d’une grand-mère matriarche, Avia, qui tient de mains de fers son exploitation agricole, et de sa mère Angélique, entièrement dévouée à la sienne et faisant peu de cas d’elle. Pas de père et un environnement où les hommes n’ont pas le beau rôle, le plus souvent absents ou violents.
Catalina se construit et s’émancipe en douceur, sans rompre avec sa famille, grâce en grande partie à la littérature, un moyen pour elle de se construire des « remparts intérieurs » et trouver les modèles qui vont lui permettre de « grandir sans partir ».
Si le lieu où se déroulait la rencontre était solennel, elle n’en a pas moins été chaleureuse, tenant bien sûr à l’accueil qui nous a été réservé mais surtout à la personnalité de cette artiste singulière qui m’a fait penser à une autre Juliette, Armanet, « habitée » par son art et animée d’une joie largement partagée hier. Une nouvelle voix, c’est certain.
©️ Eddy Mottaz / Le Temps
À propos de l’auteure
Juliette Granier née en 1980, a passé son enfance à Perpignan et a accompli des études professionnelles de musique à Paris et à la H.E.M Genève. Pianiste soliste romande, autrice, compositrice et interprète, elle est également l’une des voix familière d’Espace 2, productrice et animatrice de radio à la RTS où elle tient une émission quotidienne. « Une fille du Sud » est son premier roman.