Mon maître et mon vainqueur – François-Henri Désérable

François-Henri Désérable a eu la gentillesse de m’accorder un entretien à l’occasion de la publication de son roman : c’est ici !

« Bien à toi ». Simple. Basique… Et pourtant, ces trois mots figurant en dédicace du nouveau roman de François-Henri Désérable, « Mon maître et mon vainqueur », prennent une dimension particulière que l’on découvre en tournant la dernière page du livre.

L’intrigue commence par une arrestation, celle de Vasco, conservateur à la Bibliothèque Nationale de France. On retrouve sur lui un revolver et un cahier noirci d’une vingtaine de poèmes. Et au juge d’instruction qui l’interroge, il lui répond : « Vous n’avez qu’à lire les poèmes, tout y est ». Le juge les lit et n’y comprend pas grand-chose. Il convoque alors le meilleur ami du Vasco, le narrateur, à qui il va demander de se faire l’exégète de ce recueil de poèmes. Des textes pour décrypter une histoire qui revêt tout d’un grand classique : un homme – Vasco – tombe fou amoureux d’une femme – Tina – sur le point de se marier et déjà mère de deux enfants. Elle succombe néanmoins. Amour impossible et périlleux lorsque le mari surprend la correspondance de sa femme avec son amant… Pourtant, sous la plume du talentueux François-Henri Désérable, le roman n’a rien de convenu, bien au contraire !

« Elle n’était pas du tout son genre ; il n’avait jamais été le sien. Ils n’avaient rien pour se plaire ; ils se plurent pourtant, s’aimèrent, souffrirent de s’être aimés, se désaimèrent, souffrirent de s’être désaimés, se retrouvèrent et se quittèrent pour de bon ».

« Mon maître et mon vainqueur » revisite en effet avec brio le roman d’amour. D’abord, parce que la poésie s’en mêle et que la littérature imprègne ce livre de bout en bout. Tout commence par Verlaine et ce titre somptueux emprunté à l’un de ses poèmes, « Es-tu brune ou blonde » tiré du recueil « Chansons pour elle »… La poésie s’infiltre à chaque page, y compris dans les scènes érotiques du livre, très réussies d’ailleurs. Il est à parier que la BNF ne revêtira plus la même image après ce livre, en particulier sa salle de réserve où la passion se manifeste entre la bible originale de Gutemberg et le manuscrit des « Fleurs du mal » !

Ensuite, en raison du procédé narratif choisi par l’auteur qui a pris la liberté de muter le juge du roman de Tanguy Viel « Article 353 du Code pénal » de Brest à Paris. Le roman est construit sur la base d’un entretien entre ce juge et le narrateur, ami de Tina et de Vasco, « confident de l’un et confesseur de l’autre ».

Enfin, pour le style flamboyant de l’auteur qui nous livre ici un roman moderne, une histoire d’amour sur fond d’enquête policière où l’humour est tout le temps présent. François-Henri Désérable scanne ici le sentiment passionnel, et c’est très réussi ! Il dissèque ainsi la passion amoureuse pour en sonder les mécanismes, les ressorts et aboutit à un final surprenant ! Si le ton est enjoué et rapide, c’est à n’en pas douter pour ne pas alourdir un sujet déjà lourd et difficile, celui d’un chagrin d’amour qui, à bien des égards, s’apparente à un deuil, d’un genre particulier : celui où la personne aimée ne meurt que pour soi…

À lire, évidemment !

À propos de l’auteur

Né en 1987 à Amiens, François-Henri Désérable devient joueur de hockey professionnel à 18 ans et débute des études juridiques. Il publie son premier livre aux Editions Gallimard à 25 ans, Tu montreras ma tête au peuple et remporte plusieurs prix dont celui de la Vocation. En 2015, paraît Évariste puis, en 2017,  Un certain M. Piekielny, nominé dans tous les grands prix littéraires. Avec Mon maître et mon vainqueur paru en 2021, il obtient le Grand Prix du Roman de l’Académie Française.