Jacaranda – Gaël Faye

Gaël Faye m’avait accordé un entretien pour le Elle suisse lors de sa venue à Morges pour le Livre sur les Quais. Il est à retrouver ici.

—–

Se lancer dans la rédaction d’un deuxième roman, d’autant plus après un premier – « Petit pays » – qui a rencontré un succès certain (prix Goncourt des lycéens, 1,5 million d’exemplaires vendus, des dizaines de traductions, des adaptations en films, pièces de théâtre, roman graphique… sans compter les élèves l’étudiant en classe, y compris en Suisse !) doit sans doute être assez vertigineux. Si Gaël Faye reconnaît volontiers une grande appréhension, il dit aujourd’hui vivre un rêve éveillé : « Jacaranda » paru fin août se retrouve non seulement nominé sur les listes des grands prix littéraires d’automne mais rencontre un grand succès populaire. De lecture musicale en dédicace, partout des heures de files ininterrompues pour obtenir un bref temps d’échange avec lui…

Un engouement justifié ? Sans aucun doute ! Avec « Jacaranda », l’auteur revient au Rwanda à travers les yeux de Milan, un ado français qui découvre sur son écran de télé, aux informations, le génocide de 1994. Sa mère, qui a fui le pays longtemps auparavant, demeure pourtant irrémédiablement muette et ne lui explique rien. Au fil des années et de ses séjours dans ce pays, le jeune homme va questionner, observer et nous permettre, à travers quatre générations, d’appréhender cette réalité et, surtout, réaliser de quelle manière une société se reconstruit. Comment vivre ensemble quand une partie de la population en a massacré une autre ? Peut-on envisager de se réconcilier après un déchaînement d’une extrême violence ? Un roman qui fait aujourd’hui œuvre de mémoire alors même que 70 % de la population rwandaise a moins de 30 ans et est née après le génocide. Et nécessairement, une histoire qui retrouve un fort écho dans l’actualité : c’est un livre où il est avant tout question d’humanité..

J’ai commencé par écouter sa version audio, portée par la voix de l’auteur, une expérience très forte.

Nous sommes avec Milan, Stella au sommet de son arbre qui observe, tante Eusébie, Sartre, Claude… des personnages attachants auxquels Gaël Faye prête sa voix. Beaucoup de douceur, de tendresse, et de poésie, pour dire parfois l’indicible. Et le symbole représenté par le Jacaranda, un arbre magnifique, témoin muet du génocide dont les traces, à la différence d’une guerre, sont invisibles, qui demeure là, ancré, source d’un renouveau certain.