Grégory – Pat Perna – Christophe Gaultier

GRÉGORY – un prénom à jamais associé à ce petit garçon de 4 ans retrouvé mort dans la Vologne, une rivière des Vosges, il y a tout juste 40 ans. Chacun se rappelle l’émoi qu’avait suscité « l’affaire du petit Grégory », sur fond de jalousie et de vengeance familiale : lettres anonymes signées par un mystérieux corbeau, presse nauséabonde, juge qui se suicide, père qui tue son cousin convaincu de sa culpabilité, mère – enceinte –, emprisonnée, témoin clé qui se rétracte… Un fait divers hors normes qui défraya la chronique durant de nombreuses années.

Le roman graphique qui vient de paraître aux Arènes, dont le scénario est signé Pat Perna et les dessins par Christophe Gaultier, s’ouvre, après une tendre scène entre Grégory et ses parents quelques heures avant sa disparition, par le procès de Jean-Marie Villemin. Nous sommes dix ans après l’assassinat de l’enfant et son père est jugé pour le meurtre de son cousin, Bernard Laroche, qu’il considérait comme l’auteur du crime.

Ce livre, loin d’être simplement un énième opus sur l’affaire, présente le grand intérêt d’avoir été à l’initiative de Jean-Marie Villemin, qui l’explique dans sa préface, poignante. Conscient que l’anniversaire de la mort de son fils allait de nouveau susciter un intérêt médiatique, il a préféré prendre les devants et s’est adressé aux Arènes, dirigée par Laurent Beccaria, qui avait déjà publié l’ouvrage faisant jusqu’à présent référence sur l’affaire : « Le Bûcher des innocents » par Laurence Lacour.

L’ouvrage est centré sur ce procès, l’occasion de revisiter l’affaire, du point de vue de Jean-Marie et Christine Villemin qui ne s’étaient jamais exprimé jusqu’alors sur la manière dont ils avaient vécu ce drame. En ce sens, ce roman graphique aux déclinaisons de gris apparaît comme un document, accessible à tous, à la mémoire de l’enfant.

Si la perte d’un enfant apparaît comme la pire des épreuves, comment les époux Villemin ont-ils pu la surmonter dans ce contexte abominable ? Il ressort de cette lecture que la confiance éprouvée l’un pour l’autre, l’amour les liant, fut leur seul salut. Un message fort, souligné également par la conclusion de ce livre, signée Jacques Expert. L’auteur de polars à succès fut longtemps directeur des programmes de RTL et avait commencé sa carrière de journaliste grand reporter avec l’affaire Grégory. Au-delà de l’impact qu’aura eu ce fait divers sur lui, il livre ici une réflexion intéressante sur le métier de journaliste.