Passions littéraires

Si un livre, au-delà du plaisir de sa découverte, se révèle bien souvent la porte d’entrée à de multiples autres lectures, quatre publications récentes s’inscrivent nettement dans cette perspective.

???? Le premier d’entre eux le revendique dans son titre : « Les 1000 livres qui donnent envie de lire » (Glénat) de Sarah Sauquet. Chantier titanesque auquel la créatrice du blog « Un texte un jour » et professeure s’est attachée : identifier et répertorier parmi toutes ses lectures les mille livres qui, à coup sûr, susciteront l’envie d’en ouvrir au moins mille autres ! Dans un ouvrage ludique, pédagogique et passionnant, elle propose une sélection d’œuvres, entrecoupée d’entretiens avec des auteurs comme Amélie Nothomb ou David Foenkinos, classés de manière originale en trois catégories « Plaire, Instruire, Emouvoir ». De nombreux auteurs suisses y sont présents : Blaise Cendrars, Charles Ferdinand Ramuz, Hermann Hesse … mais aussi Joël Dicker que Sarah Sauquet fait souvent lire à ses étudiants. Parmi ses 20 livres préférés, on trouve « Elle s’appelait Sarah » de Tatiana de Rosnay, livre également présent dans mon palmarès des livres coup de cœur, et auteur du deuxième livre que je souhaite mentionner dans ce billet.

???? Avec « Nous irons mieux demain » (Robert Laffont), Tatiana de Rosnay signe un nouveau roman dans lequel j’ai immédiatement embarqué, comme d’ailleurs dans tous ses précédents ! Candice, jeune mère célibataire, assiste à un accident de circulation. Touchée par la détresse de la victime grièvement blessée, Dominique, elle se lie peu à peu à elle. Une relation complexe se noue alors entre les deux femmes, chacune habitée de lourds secrets avec, au centre de l’intrigue, un auteur majeur : Emile Zola ! Domique nourrit en effet une passion pour l’écrivain auquel elle initie Candice, embarquant au passage le lecteur dans la (re)découverte de l’auteur de la série littéraire des Rougon-Macquart. Un ouvrage qui, au-delà de ses qualités romanesques certaines, souligne le pouvoir des livres et le soutien inestimable qu’ils peuvent nous apporter.

???? Dans « Clara lit Proust » (Gallimard), Stéphane Carlier – dont je découvre la plume – use du même procédé littéraire pour cette fois-ci s’intéresser à un autre auteur majeur de la scène littéraire et dont on vient tout juste de fêter le centenaire, Marcel Proust. Coiffeuse dans un salon de province, Clara découvre un de ses livres oublié par un client. Instinctivement, elle le met de côté, le délaisse quelques temps puis le reprend, pour alors le savourer par petites touches, distillant en elle le goût d’autre chose. Les mots de Proust infusent lentement, au point de lui donner l’élan nécessaire pour changer de la vie. Stéphane Carlier, avec ce doux roman, rend un bel hommage au pouvoir de la littérature.

De salon de coiffure et de passion littéraire, il en est aussi question dans le troisième roman de l’auteur genevois Oscar Lalo précisément intitulé « Le Salon » (Plon). Tout comme Clara, le narrateur de cette histoire découvre, déposé dans un bac à livres à 1€, « La Tentation de Saint-Antoine » de Flaubert. Intrigué, il l’acquiert. Victime d’une coupe hasardeuse réalisée par un coiffeur vexé de sa réponse (à la question « Comment je vous les coupe ? », il avait rétorqué « En silence » ????), il se rend dans un autre salon, réalisant tardivement les tarifs exorbitants y étant pratiqués. Confronté à l’impossibilité de payer et pour s’acquitter de sa dette, il accepte, alors qu’il n’y connaît rien, d’expliquer dans cet établissement l’œuvre de Flaubert ! Un salon littéraire aux allures de challenge ambitieux qu’il relève, initié par le libraire lui ayant vendu l’ouvrage. Une initiation littéraire salutaire pour cet homme qui entrevoit la vie sous un jour différent grâce à un livre. Nouvel hommage aux pouvoirs bienfaiteurs de la littérature !

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