Ajouter de la vie aux jours – Anne-Dauphine Julliand
« La foudre ne tombe jamais deux fois de suite au même endroit ». Pourtant, Anne-Dauphine Julliand a été frappée trois fois. On peine à croire que cela soit possible, on ignore comme elle fait pour tenir. Pourtant, elle est là, et elle écrit.
Éditeur : Les Arènes
Nombre de pages : 144 ; Parution : oct. 2024
Elle avait publié « Deux petits pas sur le sable mouillé » en 2011 aux Arènes, un livre évoquant sa fille ainée, Thaïs, atteinte par une maladie rare et dégénérative – une « leucodystrophie métachromatique » (touchant le système nerveux central et entrainant progressivement une perte des fonctions vitales) – avec une espérance de vie très courte, et sa petite sœur, Azylis, elle aussi porteuse de la même affection. Un livre dont je n’étais pas parvenue à parler ici tant il m’a bouleversée mais qui m’avait énormément aidée alors que l’enfant d’une de mes proches se trouvait affecté par la même maladie, d’abord pour appréhender ce dont il s’agissait exactement, mais également à savoir comment réagir face à mon amie : quelles ressources trouver face à l’indicible ? Que lui dire ? Tout semblait d’un coup si trivial, si anodin face à ce qu’elle vivait !
Anne-Dauphine a poursuivi son chemin, a écrit d’autres livres, réalisé un film, donné des conférences, inspirantes, et puis son fils ainé Gaspard a mis fin à ses jours la veille de ses 20 ans début 2022. Ce nouveau livre, elle dit d’emblée qu’elle aurait voulu ne pas l’écrire. Il porte en titre une phrase déjà présente dans son premier ouvrage, entendue d’un médecin : « Ajouter de la vie aux jours, quand on ne peut ajouter de jours à la vie ».
Si ce livre permet au lecteur de relativiser ses maux quotidiens, petits et grands malheurs, le propos de l’autrice n’est pas me semble-t-il de montrer qu’il y a toujours plus malheureux que soi. Il s’agit plutôt d’évoquer les moyens dont elle dispose pour survivre et se consoler. Elle a pour elle la foi, un soutien qui lui permet de troquer les pourquoi par les comment. Elle témoigne aussi d’un lien d’amour incroyable avec son mari Loïc et, enfin, elle a l’écriture. Une thérapie ? Un témoignage fort, quelques clés pour trouver du réconfort. Morceaux choisis :
« Dans un instinct de survie, on chasse les pourquoi, ceux qui rendent fou. On se concentre sur le comment »
« On perd ceux qui meurent une fois en entier, puis on les perd sans cesse en détail. Ce sont ces détails qui font le plus mal »
« La vie m’a appris que rien ne garantit demain ».
« Vivre le jour qui vient. Rien de plus, rien de moins ».