Quelques brèves de Julie

 

 

S13 – 30 mars au 5 avril 2020

 

 

 

Un peu de culture dans ce monde de brutes.

???? « Walk the line » de James Mangold, avec Joaquin Phoenix et Reese Whiterspoon, 2005

Etonnamment, Johnny Cash est assez peu connu en France au regard de son statut d’icône parmi les chanteurs de country les plus populaires aux Etats Unis. Ce biopic dresse le portrait de cet artiste hors du commun, incarné par un acteur qui l’est tout autant : son ascension, ses addictions…Ce film retrace son parcours et particulièrement son histoire d’amour fusionnelle avec June Carter. J’ai aimé ce film pour le jeu d’acteur incroyable, et pour la mise en musique de cette passion.

À voir ou à revoir : 

???? « Peur sur la ville » d’Henri Verneuil, avec Jean-Paul Belmondo, 1975

J’avais vu ce film il y a bien longtemps. Je n’avais pas plus de 11 ou 12 ans et il m’avait alors totalement traumatisée : une tension si forte … toujours présente en le visionnant à nouveau aujourd’hui ! Notre Bébel national y interprète le rôle d’un commissaire de police traquant un tueur en série – Minos – s’attaquant aux femmes qu’il accuse de se vautrer dans la luxure. Cascades en séries, accomplies par Belmondo lui-même, tueur à l’œil de verre, dialogues ciselés, musique d’Enio Morricone… Ce film se révèle avant-gardiste à plusieurs égards, notamment la course poursuite sur le toit du métro, maintes fois reprises dans d’autres films d’action. Et le tueur qui écoute la radio et est renseigné sur le dispositif mis en place pour l’arrêter : du BFM avant l’heure. Quand la réalité dépasse la fiction ! Film incroyable, à voir ou revoir !

???? « Hippocrate » de Thomas Litli, avec Louise Bourgoin, Alice Belaïdi, Zacharie Chasseriaud, Karim Leklou, 2018, 8X52’, Canal+

Cette série est le prolongement du film du même auteur. Je l’ai adorée et ai littéralement enchainé les huit épisodes ! La série trouve évidemment un écho particulier dans la période que nous traversons. Un virus inconnu ayant infecté des patients, les médecins titulaires du service de médecine interne de l’Hôpital Raymond-Poincaré se retrouvent confinés chez eux pour 48 heures. C’est précisément à ce moment que deux internes inexpérimentés – Alyson et Hugo – débutent dans le service et rejoignent une troisième interne, en 4e année, aussi douée qu’ambitieuse et glaciale, Chloé, incarnée avec brio par la talentueuse Louise Bourgoin qui explose dans ce rôle. Rejoints par Arben, un médecin légiste venant d’un pays de l’est, ils vont devoir faire bloc pour gérer seuls le service et les malades. Mais la quarantaine se prolonge… dans un environnement en crise où les déficits budgétaires sont criants de vérité. Série très réaliste au rythme soutenu mais de manière plus subtile que dans une série comme Urgences. Tout y sonne plus juste : la pénurie de l’hôpital, les tensions entre services, la rivalité entre médecins, les secrets des différents protagonistes… Les explications sur les interventions médicales ou les termes médicaux ne sont pas forcément donnés mais le spectateur les vit, tout simplement. Les personnages sont tous très attachants, chacun dans leur genre. Thomas Litli, réalisateur de la série, a lui-même pratiqué la médecine durant 15 ans avant de passer à la réalisation de films. Il vient d’ailleurs de revenir à la médecine et a intégré les urgences de l’hôpital Robert-Ballanger en Seine Saint-Denis, là même où est tournée la saison 2 de la série dont la diffusion était prévue fin 2020…

???? « Les corps conjugaux », de Sophie de Baere, JC Lattès, Janvier 2020

Jusqu’où est-il possible d’aimer ? L’amour porté à une mère, un mari, un enfant… connaît-il des limites ? Sophie de Baere interroge cette magnifique thématique à travers un roman saisissant. Un sujet audacieux traité de manière magistrale. Coup de cœur pour ce deuxième roman au si joli titre !
« L’existence n’est qu’un apprentissage de la perte (…). Jusqu’au salut ultime, la vie n’est en réalité rien d’autre qu’une succession d’éclipses ».
Une phrase qui résume douloureusement et parfaitement bien la vie d’Alice. Tout commença par son père qui décida, alors qu’elle était seulement âgée de quelques mois, de quitter sa femme et ses trois enfants pour refaire sa vie ailleurs, sans eux. Alice a grandi alors sous le joug de sa mère qui l’exhibait, tel un animal de foire, dans les concours de beauté locaux. Lasse de cette vie terne, où elle s’étiolait pendant sa formation d’esthéticienne à l’ombre de sa mère, pygmalion lugubre et toxique, Alice quitta le domicile familial à 18 ans, destination Paris ! C’est là qu’elle fit rapidement connaissance avec Jean, son voisin. Une évidence, dès le premier baiser échangé.
Suivirent des années de bonheur intense, la naissance d’une petite fille prénommée Charlotte et enfin, dix ans après l’arrivée de la petite, un mariage, au cours duquel Alice revoit sa mère dont elle avait perdu le contact depuis fort longtemps. Et c’est à la suite d’une discussion avec elle et la révélation d’un terrible secret de famille qu’Alice disparaît brutalement, sans rien emporter et sans un mot d’explication à son mari ou à sa fille qu’elle laisse, totalement désemparés.
Un abandon devenu alors incontournable à ses yeux, et le début d’une nouvelle vie d’errance, atroce, pour eux trois. Qu’a pu dire sa mère à Alice pour que celle-ci s’inflige ainsi qu’aux êtres qu’elle aime le plus une blessure aussi abominable ? Comment une mère peut-elle, en pleine conscience, décider d’abandonner son enfant avec lequel elle a vécu dix années idylliques ?
J’avais découvert Sophie de Baere avec son premier roman, La Dérobée, et avais été immédiatement emballée par sa plume et son talent narratif. J’ai à nouveau été transportée et bouleversée par cette intrigue, inspirée, aussi surprenant que cela puisse paraître, d’une histoire vraie. Cette fiction repose donc sur un fait divers qui a même donné lieu à d’autres romans, dont un que j’avais beaucoup aimé aussi, chroniqué sur L’Apostrophée… Au risque de trop en dire, je ne dévoilerai pas ici duquel il s’agit !
Le sujet des « Corps conjugaux » est difficile, âpre et terriblement délicat. S’y frotter était nécessairement périlleux. J’ai lu ce livre la gorge totalement nouée, n’imaginant qu’une fin dramatique, digne des plus anciennes tragédies grecques. Tout le talent de l’auteur est de parvenir, par son écriture poétique, ciselée et portée par des émotions fortes, non seulement à tenir son récit avec un final moins lugubre qu’il n’aurait pu l’être mais, surtout, de susciter de l’empathie pour cette femme qui décide sciemment d’abandonner les siens. Une histoire forte aux confins des limites de la morale et l’amour … Un vrai coup de cœur Chronique complète ici.
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